Henry Wieczorek aurait presque 100 ans aujourd’hui. Son engagement, son courage et le destin en ont décidé autrement. Le 22 janvier 1945, il effectue une mission comme chef de section et décolle de Tantonville. Son chasseur bombardier Thunderbold P-47 est en difficulté mécanique, le jeune pilote américain de 23 ans évolue en plein brouillard. Il découvre qu’il survole le village de Mortagne, qu’il veut épargner à tout prix, car il porte une bombe de 250 kg. Tout va très vite, il attend la dernière seconde pour s’éjecter. Malheureusement, il est trop bas, son parachute est en torche, il descend trop vite et il se tue en fin de course. Son avion s’écrase et se disloque plus loin, entre champ et lisière de forêt, sans faire de victimes.

Il est enterré provisoirement dans le cimetière militaire des États-Unis du Quéquement a Dinozé. Son corps est transféré ensuite aux États-Unis par transport militaire et atteint New York début février.

Il recevra à titre posthume la Purple Heart, la médaille de l’air pour ses missions et vols opérationnels soutenus contre l’ennemi, ainsi que l’étoile de bronze avec des grappes d’argent et des feuilles de chêne.

Ce dimanche, après la traditionnelle cérémonie de commémoration de la libération au Haut-Jacques, Lionel Leclerc, maire de Mortagne, dévoile la plaque commémorative en l’honneur du jeune Henry, sur le mur du cimetière, à quelques mètre du lieu de sa chute fatale. De nombreuses personnalités et élus étaient sur place, ainsi que plusieurs présidents d’associations patriotiques.

Henry WIECZOREK est né le 20 octobre 1921, quasi 100 ans jour pour jour et pourrait encore faire partie du dernier carré des vétérans de la seconde guerre mondiale. II est le fils d’Alexandre et de Boleslawa WIECZOREK, immigrants venus de Pologne. II a deux sœurs et est originaire d’Elyria, ville de 50 000 habitants dans l’Ohio (N.E des États Unis). Il travaille a la fonderie de cette même ville, après avoir suivi une scolarité secondaire. A 19 ans, en 1940, alors que les États Unis n’ont pas encore connu Pearl Harbor (07.12.1941) et ne sont pas encore en guerre, Henry s’engage. Il poursuit son instruction et demande à être versé dans l’armée de l’air. Il se retrouve ainsi en Angleterre, vole aux côtés des anglais qui subissent les bombardements allemands sur Londres.

Le débarquement du 06.06.44 fait reculer l’allemand, Henry est affecté TANTONVILLE (54), sur la base construite pour la 9ème force aérienne. Henry sert au 406° escadron de bombardiers, 371ème groupe de chasseurs, sur un aérodrome non terminé d’où vont décoller les Thunderbold P-47, chasseur bombardier. La devise de son groupe est « SE LEVER ET DÉFENDRE ».
Le P-47 est un chasseur bombardier monoplace maniable, doté d’une grande puissance de feu et encaissant les coups. Il sera l’avion américain le plus produit durant le conflit.

Ce type d’appareil emporte une bombe de 250 kg, pique à 300 km/h sur son objectif (train, usine, char, convoi, gare de triage, ponts), descend à 250 m d’altitude, largue sa bombe pour faire mouche
et remonte. Ces pilotes reçoivent une instruction particulière, puisque exercice périlleux pour des chasseurs-bombardiers en piqué. Des films récents comme Pearl Harbor ou Midway décrivent très bien ce que ces pilotes pouvaient réaliser. Larguer sa bombe de trop haut faisait manquer l’objectif, trop près l’exposait au tir de DCA, voir être trop court pour remonter après la piquée.

Son escadrille opère lors de la bataille des Ardennes et accompagne l’avance des alliés lors de leur marche vers BERLIN.

Ces pilotes assuraient la couverture aérienne et la protection des opérations au sol et déplacements des forces terrestres. Imaginez le sang-froid, la témérité et la condition physique de ces jeunes pilotes! Le 22.01.1945, Henry est chef de section et décolle de Tantonville. Il effectue une mission sur l’Alsace et la poche de Colmar (20.01 au 09.02.45). Peu de temps après, au-dessus de Rambervillers, il se signale par radio comme ayant un problème mécanique. On peut imaginer aisément le lieutenant WIEZORECK analyser sa situation, découvrir qu’il survole Mortagne et que s’éjecter est compliqué surtout en laissant son avion s’écraser, mais où? Le brouillard ne l’aide pas, et au moment où il décide de s’éjecter, il est malheureusement à trop basse altitude. Son ailier le perd de vue et le cherche. Le plafond est bas et il est contraint de passer sous les nuages (800 m d’altitude) pour apercevoir le lieutenant WIECZOREK avec son parachute en torche.

Le lieutenant WIECZOREK chute donc a quelques mètres d’où nous sommes, et son avion poursuit son vol pour se crasher non loin de ce qui est aujourd’hui le captage d’eau potable de Mortagne. L’avion s’écrase a l’époque entre champ et lisière de forêt et se disloque. Le moteur est arraché, projeté en avant, sa bombe se décroche et va sectionner des sapins un peu plus loin.

Malheureusement Henry décède durant son saut. Il est retrouvé pendu dans un arbre, le pied arraché, avec quelques-uns de ses effets personnels au sol. Il a 23 ans et sa vie s’arrête a 6 644 km de sa ville natale. Henry sera récupéré par la police militaire américaine qui avisera le quartier général du 371ème groupe de chasseurs.

Il est enterré provisoirement dans le cimetière militaire des États-Unis du Quéquement a Dinozé. Son corps est transféré ensuite aux États-Unis par transport militaire et atteint New York début février.

Le lieutenant WIECZOREK était membre de l’église Sainte-Croix, ainsi que ses parents. Les funérailles ont lieux a la résidence WIECZOREK. Le révérend père Lawrence Budny, curé de l’église, officie avec d’autres prêtres assistant les services militaires. L’enterrement a lieu au cimetière St Mary’s.

Henry reçoit la Purple Heart, la médaille de l’air pour ses missions et vols opérationnels soutenus contre l’ennemi, l’étoile de bronze avec des grappes d’argent et de feuilles de chêne à titre posthume.
Son papa décède en 1950, sa maman en 1969. Ils sont inhumés avec leur fils.
Nos aînés aujourd’hui présents, des gosses hier se souviennent très bien de cet événement et du ballet aérien décrit ici au- dessus nos têtes, il y a 76 ans. De ce mois de janvier 45 digne d’un hiver vosgien où un américain venu de l’Ohio laissa tous ses projets d’avenir en quelques minutes.

 

Gerardin Olivier

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